Robert VOIRIN
mercredi 28 octobre 2015 - Bibliothèque des trois horloges
Le : 28/04/2014 21:13
LE CABASSETTE ET LE COUFFIN (fable)
Au fond d'un placard le cabassette et le couffin s'ennuyaient beaucoup, depuis qu'ils avaient quitté leur Bab El Oued natal ils ne sortaient plus du tout, alors il se racontaient des histoires pour tromper leur ennui, surtout celles qui parlaient de leurs anciennes et nombreuses sorties quand ils accompagnaient la famille au marché, en forêt ou au bord de mer. Ainsi à Pâques on les remplissait de ce qu'il y avait de meilleur sur terre, le cabassette disait qu'il transportait la soubressade, la calentita, le boutifar, la pastera sucrée, les poivrons grillés, et la si fine fritenga, les anchois, les dattes et les figues sèches, les délicieuses cocas, les mantécaos, sans oublier le bon selecto et le fameux Mascara. Le couffin se vantait d'être plein de zlabias au miel, de douces oreillettes, de makrouts, de la belle mouna, sans oublier les succulents roliettes. Ils étaient tellement lourds qu'ils n'en pouvaient plus surtout qu'il fallait tenir jusqu'à la fôret de Sidi Ferruch pleine de monde partout. Là au milieu des cris de joie on commençait à les vider, pour l'apéritif les tramousses et les variantes étaient sortis en premier car avant le repas on sirotait bien sur l'anisette traditionnelle en trinquant à la bonne santé de tous dans une fraternité si belle. Puis au milieu d'une joyeuse ambiance on déballait tout et chacun se servait,tous les membres de la famille pouvaient alors commencer à se régaler. Dans la soirée pour le retour à la maison le cabassette et le couffin maintenant si légers pensaient déjà à faire les courses dès le lendemain matin, à Bab El Oued ils continueraient ainsi à déambuler dans les allées du marché où ils seraient encore remplis de ces bonnes choses qui faisaient leur fierté. Bien longtemps après, alors qu'ils se lamentaient toujours sur leur sort, une main amie qui les avaient bien connus leur apporta un grand réconfort, et pour ne pas qu'ils toment complètement dans les oubliettes ils furent sortis du placard pour aller à des commissions ou à des fêtes, réconfortés ils purent se dire qu'on ne les avait pas laissés tomber pour enfin revivre en pensant à Sidi Ferruch et ses belles journées.
Moralité : recevoir le passé comme un héritage c'est combattre l'oubli, le mépris, et l'indifférence.
Robert VOIRIN