Né à Bab El Oued - 1948 - ALGER

 

Bibliothèque des trois horloges

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Abdelkrim ALLOUCHE

je ne peu m'empécher de parler de mon passé les moments les plus agréable c'était l'école et les kermesse de fin d'année les moments les plus fou c'était l'orsque en nous emmené pour la visite un genre de controle médicale mon quartier notre dame d'afrique sur cette place nos regard se penche ver cette baie qui domine le stade de st eugene se magnifique endroit pour moi il reste féérique en joué au foot au stade des pére blanc méme le ciel nous parait plain d'étoile il y avait tout en haut un autre village qui s'appellait village celeste etonnant un nom celeste village marie chemin des pelerins chemin des karmene ces village plain de douceur ou l'on est appaisé comment pouvoir l'oublier NOTRE DAME A! si tu pouvais savoir Dans quel état tu ma laissé En te quittant un soir Ces mon ame que tu à bléssé Comme un jardin étrange Revient revient m'arroser Pour que l'oiseau de la branche puisse venir m'enchanter Ce refrain qui à chaque instant resonne Des l'approche de l'automne Mon village et oubliier Avec tout sa vertu Des joie qui m'apporté Et des souvenir perdu

Guy SOLTANA

Les souvenirs sont un bien très précieux. Chacun a les siens mais les nôtres, à nous PN, se ressemblent et je voudrais vous faire partager les miens que mon épouse (l'Alsacienne) a mis en vers pour ma plus grande émotion. Ce poème, un peu long, déjà paru dans le journal de l'ABEO, prend de la place et je voudrais m'en excuser.

Amicalement à vous tous. Guy

Bab-el-Oued

Quand revient l'été et que le soleil

Caresse les roses, mûrit les groseilles

Je suis nostalgique et rêve de là- bas

Du pays perdu qui fut mon chez-moi.

Dans l'air immobile flottent mille senteurs

Des odeurs de miel, de menthe et de fleurs

Et je me revois dans la rue Mizon

Jouer aux soldats ou bien au ballon.

Avec mes copains, P'tit Jean et P'tit Pierre

José et Marco, Michel et Norbert

Nous faisions bien sûr les quatre-cents coups

Nous étions heureux et nous étions fous.

Et je crois sentir l'odeur des beignets

Que le brave Blanchette des fois nous donnait

Nous crachions noyaux, riant et criant

Des bonnes grosses olives du vieux père Hazan.

Ô mon doux quartier, mon cher Bab-el-Oued

Où se côtoyaient Maurice, Mohammed

Je me souviens de ton exubérance

Des années de bonheur de mon enfance.

Et j'entends encore le chant de ma mère

Qui de sa belle voix, si douce et si claire

Rendait un hommage à ce beau pays

Lui jurant, confiante, amour pour la vie.

Il y avait Louis, Roland, Raphaël

Mes tontons frimeurs un peu paternels

Qui au «Pénalty» tenu par Roger

Buvaient l'anisette en jouant aux dés.

Dans les poches profondes de son tablier

Ma vieille grand-mère ramenait du marché

Pour son petit fils et P'tit Jean aussi

Ki-kilomètres, loukoums et oublies.

La rue s'éveillait après la chaleur

Elle s'animait à partir de vingt heures

Le monde affluait à la Basseta

Et on chantait avenue Bouzaréah.

Je revois encore lorsque le jour baisse

Cette foule joyeuse, ces soirées de liesse

Et comme au vieux temps je les vois unis

Parents et amis à jamais partis

Oui, je me souviens de nos dix-huit ans

Nous draguions les filles près du Marignan

Nous étions leurs princes bien sûr en blue-jean

Les rois du quartier roulant en Dauphine.

Au ciné du coin dit le Majestic

Lorsque s'éteignaient les lampes électriques

Nous leur susurrions qu'elles étaient jolies

Et froissions leur jupe en coton vichy.

Aux Trois Horloges nous avions rendez-vous

Et leur carillon se moquait de nous

De notre impatience, de nos prises de tête

Allaient-elles venir, Renée et Francette ?

Dieu, qu'elles étaient belles, de jeunesse parées

En ballerines, un rien effarouchées

Aux surprises-parties ou aux bals du soir

Nous dansions sur les airs des Chaussettes Noires.

Enfants d'ouvriers ou de commerçants

Nous n'étions pas riches, nous étions vaillants

Et nous avions tous un seul voeu fervent

Passer notre vie ici, simplement.

J'ai la nostalgie du bord de la mer

De ses cabanons, celui de mon père

Du sable chaud de la plage de l'Eden

Et des Deux Chameaux, je les croyais miennes.

Les rochers Charlemagne et du Fauteuil

Quand nous sommes partis ont pris le grand deuil

Dans une brume épaisse ils se sont chachés

Afin de ne pas nous voir embarquer.

Ô mon Bab-el-Oued, ma Porte du Ruisseau

Nous t'avons fermée, en larmes, le coeur gros

Pourrai-je un jour encore te pousser

Dans le sens contraire, trouver mon passé ?

Des tendres années laissées sur ton seuil

Mon âme à jamais en porte le deuil

Mes rêves d'enfant comme d'adolescent

Sont restés là-bas, chassés par le vent.

Ô toi Bab-el-Oued, ma cité perdue

Serrés dans tes bras nous avons vécu

Heureux, insouciants, un peu comme des rois

Souviens-toi de nous, Pieds-Noirs,... quelquefois.

Guy SOLTANA

Je voudrais, une fois n'est pas coutume, rendre un hommage à nos conjoints Patos originaires des quatre coins de l'hexagone et d'ailleurs. Celles et ceux qui nous supportent, comprennent notre nostalgie, prêtent un oreille attentive aux récits de nos souvenirs, nous mitonnent les bons petits plats de chez nous (généralement les femmes), nous encouragent dans nos recherches, adoptent même nos expressions, bref, qui nous aiment. Qu'elles et ils en soient remerciés et en particulier mon épouse qui a glissé ce poème(qui prend un peu de place)dans mon dernier cadeau de Noël. Guy (avec un petit clin d'oeil à Marie de BEO qui comprendra)

Mon mari, le Pied-Noir.

Mon mari est pied-noir, il vient de Bab-el-oued

Il est bien de là-bas, ça se voit à sa tête

Il a un drôle d'accent, pas celui du terroir

La «purée-de-nous-autres» n'est pas un plat du soir.

Mon mari est pied-noir et alsacienne je suis

Couple peu ordinaire, c'est ce que pense autrui

Quand je m'exclame « ayo ! » il lève les yeux au ciel

Ah, les mots des Patos n'ont pas le goût du miel !

Mon mari est pied-noir, il n'aime pas trop l'hiver

C'est vrai dans son pays pas besoin de polaire

Je lui réchauffe le coeur lorsque dehors il neige

Les draps chauds en flanelle sont le plus doux des pièges.

Mon mari est pied-noir, il pleure son beau pays

Un enfant du soleil s'est échoué ici

La soupe aux haricots mais aussi la choucroute

De les aimer un jour, oui quelquefois il doute.

Mon mari est pied-noir, il rêve d'exubérance

Les gens d'ici aux fous ne font pas trop confiance

C'est question de climat, aussi de caractère

Ils ont souvent souffert des traîtrises et des guerres.

Tout comme lui le Pied-Noir, ils aiment danser et rire

Autour d'un feu de joie pour son plus grand plaisir

Leur accent guttural se fait l'écho du sien

Pour que les voix s'unissent et chantent le même refrain.

Mon mari le Pied-Noir fait tout pour s'intégrer

Il craint que jamais plus il ne verra Alger

Moi je lui tiens la main, « vois comme l'Alsace est belle ! »

Je veux qu'il soit heureux au pays de Noël.

André TRIVES

ILS ETAIENT TOUS LA...

Hier 1° juin 2008, dès l'aube on vit s'amonceler anormalement de nombreux nuages menaçants à l'aplomb des platanes centenaires du Grand St Jean à Aix en Provence. Par cumulo-nimbus entiers ils avaient tenu à être présents à l'évènement devenu planétaire de leurs enfants nés à Bab el Oued comme eux-mêmes: ils n'auraient pour rien au monde voulu manquer la réunion annuelle de la fraternité du quartier de leur d'enfance. Une affection fraternelle de 178 ans mériterait à coup sûr de figurer dans le livre des records. Leur arrivée en nombre obstruât pour quelques temps le soleil emmêlé dans sa timidité. Les embouteillages assombrirent le ciel devenu maussade et un manque de place de stationnement contrariât l'enthousiasme de certains, seule la vue plongeante et imprenable leur faisait dire:" de là, je ne pourrais pas louper l'arrivée des miens". Le branle-bas de ces retrouvailles les avait fait se lever tôt, ils avaient hâte de se rencontrer eux aussi: familles, amis, voisins de l'immeuble et de la rue qui nous avaient quittés. Leur joie et leur excitation indescriptible de petit garçon devant un jouet de Noël leur faisait répéter:" Ensemble, elle était belle la vie chez nous."

Dans l'humidité ambiante, ils attendaient avec impatience de percevoir leur descendance sans être certain de les reconnaître. Le foulard et la casquette ne faisant plus partie de leur habillement, ils se réchauffaient en riant à gorge déployée en se rappelant les derbys de foot entre l'ASSE et le Mouloudia, entre le Gallia et le Red Star. Il faut préciser que parmi eux il y avait Marcel SALVA, Louis LANDI et bien d'autres champions qui avaient écrit les pages de gloire du foot de notre quartier. Puis les voitures arrivèrent en un flot ininterrompu jusqu'à perte de vue, de là-haut c'était impressionnant: par assauts successifs on les voyait s'étreindre à tour de bras dans la joie et les pleurs, ils se reconnaissaient après un moment d'hésitation et pointant un index accusateur, ils criaient:" Ooouuuiii, t'y es le fils de la concierge, ça fait 46 ans qu'on s'est pas vu, t'y as pas changé." C'était du délire, de l'indicible, du Bab el Oued, quoi !

Avec le soleil qui jouait à cache-cache et cette foule bigarrée qui s'agitait dans tous les sens, c'était pas évident pour nos anciens de retrouver les visages familiers atteints de calvitie ou de cheveux tous blanchis. Malgré l'émotion, ils avaient recours à la méthodologie du pifomètre: " C'est lui, c'est mon fils, il parle toujours avec les mains", " Je suis sûr que c'est lui, il a toujours crié en parlant, il voulait toujours avoir raison", " C'est pas possible comme il a grossi", " ça alors, la fille Bérenguer elle a fini par lui mettre le grappin dessus", " Regardes, celle là avec le couffin et la glacière, c'est ma fille et mes petits enfants, je suppose ! "

Au même moment l'encombrement de la circulation sur terre était aussi noir que là-haut, l'émotion des retrouvailles aussi émouvante sous les platanes que sur le promontoire vaporeux, on pleurait de partout: c'est à ce moment précis que des gouttes de pluie arrosèrent la campagne, soulevant pour un court instant l'affolement de leur progéniture. Il n'est de secret pour personne que la pluie a toujours gâché la fête, alors nos regrettés parents comprirent qu'il fallait vite rentrer pour ne pas ternir les réjouissances; eux aussi en leur temps avait fustigé et dédaigné les nuages et la pluie. Aussi, c'est la gorge étranglée de sanglots, le coeur silencieux de tristesse qu'ils résolurent de se quitter en se promettant de revenir l'an prochain pour retrouver ceux à qui ils avaient donné la vie. Mais cette fois-ci ils feront en sorte de trouver des véhicules moins contraignants: des nuages sans pluie pour rester plus longtemps. Comme un seul homme ils s'installèrent douillettement dans leur transport en suspension et s'en retournèrent là où d'ordinaire ils rêposent en paix. Momo et Lyas saluèrent Rolland ABISSEROUR et partir les derniers en direction des étoiles qui brillent sur les hauteurs de Bab el Oued.

Le soleil désormais participait à la liesse, on se pourléchait d'envie à la vue des pâtisseries aux amandes dégoulinant de miel, une colonne de fumée alléchante provoquait les appétits gloutons autour du brasero de merguez, le chant des Africains repris en coeur par la foule dressait une chair de poule collective, Franck, l'animateur fidèle, redonnait des joies endiablées sur la piste aux souvenirs avec des airs populaires,la fête battait son plein. Le président de l'ABEO Raymond PALOMBA pouvait être fier avec toute son équipe de bénévoles pour cette grande journée de communion amicale et fraternelle autour de ce mot magique: BAB EL OUED.

Que la vie perdure et s'écoule lentement, mais que cette réunion annuelle des enfants de Bab el Oued revienne vite, très, très vite...

Michèle VERNETTOZZA

Je viens de lire les derniers messages et je dis un grand bravo à André Trivès qui nous rappellent tant de souvenirs qui sont parfois les nôtres à BEO...

Tout cela réveille en nous de la nostalgie et aussi de la tristesse d'avoir perdu tant de belles choses..

Il aut continuer à en parler à nos enfants et à nos petits-enfants car notre vie à BEO était vraiment particulière et tellement pleine de convivialité.

BEO était un quartier merveilleux, populaire, animé et tout le monde se connaissait. Nos voisins étaient nos amis et même souvent étaient considérés comme de la famille...

Merci de nous avoir fait revivre des souvenirs inoubliables et je vous dis à dimanche à Rognes mais il faudrait que chacun se reconnaisse. Bonne fin de journée.

Merzak TAMENE

Pour FASANO Pierre-Claude et TRIVES André

Pour continuer sur la lancée des souvenirs, bien sûr la friperie de Bab Edjdid et les Stocks Américains, au début de la rue Borély la Sapie, avant le Kassour. Mais indépendamment de notre volonté, d'autres lieux nous reviennent en tête. Ave de la Bouzaréah, aprés les 3 horloges, en allant vers le Café de Barcelone sur la gauche, il y avait un minuscule estaminet "Mon P'tit Bar" où se tenaient toujours plusieurs personnes, quelques unes en tenue de travail, qui prenaient l'apéro sur le seuil, en se racontant des calembredaines. Il y avait aussi à un jet de pierre de là, rue Fourchault pas loin du Bain Maure, la Cinique Ferrari où beaucoup d'enfants du quartier sont nés.

Et Ave de la Bouzaréah, pas loin du Trianon, il y avait une bijouterie, "Algeria Bijoux" qui, si mes souvenirs sont exacts, faisait office de Mont-de Piété.

Tant de commerces, cinémas, et autres ont disparu, effacés par le temps, et auxquels nous pensons de loin en loin avec regret.

Merci à vous deux de bien vouloir partager avec nous ces richesses.

Bonne soirée à toutes et à tous.

Tamene Merzak.

André TRIVES

BAB EL OUED ENTRE TRADITION ET MODERNITE

Printemps 1956- Après un automne pluvieux et un hivers ridicule, le retour du printemps redonne au quartier ses habitudes coutumières et la rue redevient le grand théâtre des plaisirs et des émotions. Le soleil est de nouveau présent à la nuit tombée par l'empreinte laissée sur la peau encore rougie. C'est dans une ambiance amicale et bon enfant au retour du travail que les attroupements de copains et copines se forment devant les bars et les entrées d'immeuble pour parler de tout et de rien. Ici, la tchatche est importante, c'est la thérapie de groupe la plus répandue. Alors on discute et on confie à ses amis les problèmes de la vie, juste "en bas la rue".

L'avenue de la Bouzaréah retrouve son "supermarché annuel de la drague" où dragueurs et draguées se rencontrent ou se croisent furtivement pour tenter de trouver "chaussure à son pied". Un terrain de chasse à la"petite caille" s'établit sur le parcours entre les 3 Horloges et le square Guillemin; filles et garçons rêvent de la rencontre providentielle qui changerait le destin de leur vie. C'est probablement le seul endroit de la ville où l'épidémie de torticolis affecte gravement les garçons "armés" d'un peigne qui accompagnent du regard le passage d'un "canusse".

Depuis quelques temps la jeunesse du quartier en quête de mythes et de légendes est en train de vivre un changement extraordinaire et terriblement excitant: on ne veut plus ressembler à cette vie toute tracée, on veut vivre différemment.Désormais, la rue nous contraint à des modes et des comportements importés d'ailleurs, et pour la jeunesse de Bab el Oued c'est une liberté de s'y soumettre. Nous vivons l'époque des toutes premières fois en tous genres. C'est la première fois que:

on s'habille avec des "sweats" et "tee shirts" portant des inscriptions de collèges américains, les filles montrent leur nombril en portant le bikini et dévoilent impudiquement le genoux avec la scandaleuse mini-jupe, on danse "comme des barjots" tout seul, sans enlacer sa partenaire le twist, le madison ou le houla hop, les chanteurs ont l'âge de leur public, le rock and roll est n°1 à la salle des fêtes de St Eugène et au bal de la Redoute, la laque détrône la gomina, la 4 cv démocratise les déplacements et les embouteillages bloquent la circulation au boulevard de Provence, le cinéma Trianon devient un monoprix, le Bijou, roi du cinéma western, prend le nom fétiche de Lynx,

la fontaine qui avait fait le bonheur de générations d'enfants à l'angle de l'avenue des consulats et des Messageries est rasée pour faciliter le passage des trolleybus vers Notre Dame d'Afrique, le poste "transistor" véhicule la musique en toute liberté, le disque 45 tours efface à jamais le 78 tours, la musique américaine envahie nos chambres d'adolescent avec le "teppaz", les surprises-parties révolutionnent nos dimanches après-midi où danser un slow des Platters, de Fats Domino ou de Paul Anka avec une fille qui a bien voulu accepter votre invitation est un moment divin, les garçons se coiffent à la Elvis tandis que les filles portent deux couettes enrubannées à la Brigitte Bardot, les robes sont fabriquées à la maison avec du tissus vichy bleu ou rouge comme dans le film"Et Dieu créa la femme", les rêves des garçons d'avoir une voiture américaine ou une "MG" restent des rêves et leurs inspirations sont suscitées par James Dean ou Jacques Charrié dans " Les tricheurs", la Vespa ou la Push procure à quelques privilégiés les clés de la puissance surtout auprès des filles, les salles de jeux à destination des jeunes proposent en plus du billard traditionnel, le bay-foot et le billard électrique appelé "flipper" qui nous apprend qu'à trop en vouloir, la vie peut faire "tilt" ( au bar de chez Raymond, on attendait avec impatience le réparateur de flipper Pierre Claude FASANO qui en partant nous offrait des parties gratuites).

Cette nouvelle vague vit dans l'insouciane une révolution culturelle comme jamais vécue. On la qualifiera de"blouson noir", de "rocker", de "teen ager", de "yéyé", mais personne ne le sait encore. Tous partagent ces nouveaux rites et ces transformations, et rien ne pourrait les en détourner. Nos parents ne comprennent pas cette envie de changement que la rue nous impose. Nous sommes témoins et acteurs d'une vie nouvelle qui nous grise par sa vitesse, qui nous éblouit par ses plaisirs, qui nous étonne par sa modernité et qui nous démontre que rien ne sera plus comme avant. Une chose est sûre: on fait avec les moyens que l'on a.

La télévision ne nous manque pas puisqu'elle n'existe pas sauf en démonstration dans la vitrine de Discophone où s'agglutinent les badauds. Le Marignan, le Majestic, le Plazza, le Suffren, le Monciné,le Lynx, le Rialto et autres cinémas Laperle ou les Variétés, ravissent les nombreux cinéphiles du quartier avec des films en noir et blanc. La couleur sur écran ou photo n'existe pas certes, mais elle est dans les têtes, dans les coeurs, dans le décor et les magnifiques paysages où Bab el Oued s'unit avec les bleus de la mer entre le Cassour et l'Eden: du bleu cajoleur de l'été au bleu agressif des tempêtes, du bleu éclatant de lumière au bleu mystérieux des nuits profondes, du bleu de l'allégresse au bleu de la mélancolie d'hiver. Sans oublier le bleu lumineux du ciel immaculé qui met dans un écrin de beauté Notre Dame d'Afrique la gardienne de tous les habitants du quartier.

Seuls les plaisirs simples qui se vivent en famille et réunissent les voisins perdurent comme ces soirées où l'on "prend" le frais sur le balcon en tenue légère jusqu'à tard dans la nuit à la recherche d'une brise rafraîchissante venant de la mer. La braise incandescente des cigarettes dans l'obscurité témoigne de cette vie tardive que l'on partage avec la famille, les amis et la nature. Dans la rue quelques-uns reviennent de chez "La Princesse" ou de chez "Grosoli" le pas nonchalant, d'autres rentrent du cinéma, se remémorant à haute voix les scènes du film qu'ils viennent d'admirer. Minuit ne va pas tarder, on bâille et on sétire une dernière fois, le silence enveloppe soudainement le quartier, les douze coups de l'horloge de l'école de la Place Lelièvre marquent la limite de la journée, demain sera un autre jour, Bab el Oued avec des rêves plein la tête s'endort en toute sérénité.

Je dédie cette vision de mon enfance à Mohamed NEMMAS, dit MOMO qui tout comme moi a vécu cette belle page de l'histoire de Bab el Oued.

Annie SALORT

Le cadeau de mon petit-fils David de 8 ans à sa mère, ma fille.

Où que tu sois Maman je te le dédie.

J'ai cherché dans les poèmes,

Comment te dire je t'aime.

J'ai trouvé des mots savants

Bien trop longs pour mes 60 ans.

J'ai cherché ailleurs

Et j'ai trouvé dans mon coeur

Les mots que tu m'as appris

Quand j'étais encore petite

Maman je t'aime Grand comme çà

Je te le dis avec mes bras.

MAMAN TU ME MANQUES !

Sydney BOISIS

Te souviens-tu ?

Quand arrivait Noël et ses belles lumières,

sa magie, les enfants impatients, les sapins.

Te souviens-tu ? Cette nuit-là dans nos chaumières,

nous attendions nos cadeaux jusqu’au froid matin.

Les sabots en chocolat pour la gourmandise,

au pied de l’arbre embelli pour les chanceux,

nous avions hâte de goûter aux friandises,

près du père Noël imaginaire, nous étions heureux.

Fiers on montrait notre belle trottinette,

ou notre fusil pour jouer à Zorro et courir,

tout le quartier devenait bruyant, c’était la fête,

le pauvre et l’orphelin retrouvaient le sourire.

Te souviens-tu nous vivions un conte de fée ?

On était chic, belle chemise, beau pantalon,

le dimanche nous allions au cinéma ou au café,

reluquant les filles on se prenait pour des apollons.

Près de la belle bleue, nos rêves n’étaient pas vains,

envolées les erreurs de jeunesse qu’on pardonne,

très tôt nos mains offrirent un précieux gain

à nos mères, sous le regard de la madone.

André TRIVES

UNE FAMILLE PAS COMME LES AUTRES.

Si je vous disais que la famille à laquelle j'appartiens se compose de 100.000 frères et soeurs,vous auriez du mal à me croire. Si j'ajoutais que ces hommes et ces femmes se reconnaissent une même origine, tous issus d'une même matrice ayant forgé un lien indissociable, vous continueriez de douter. Mais si je précisais que le creuset qui a créé ce peuple atypique se trouve à l'ouest d'Alger et se nomme le quartier de Bab el Oued; vous vous reconnaîtriez alors comme membre de notre diaspora.

Notre peuple est né avant 1962, il a bénéficié de l'apport de la diversité: maltais, italiens, algériens, français, espagnols, juifs, musulmans, chrétiens et athés; et n'allez pas dire à ces braves gens qu'ils sont différents, ils sont justement l'addition de ces différences avec un même coeur et un même sang. Ainsi, Bab el Oued le berceau de notre enfance nous réunit quotidiennement sur le site de notre ami Chistian TIMONER (sexagénaire de dernière minute que nous félicitons de tout coeur) qui a su instiguer un principe simple:" parlons de ce qui nous rassemble et pas de ce qui nous divise". C'est de toute évidence la meilleure façon de respecter autrui. Alors Bab el Oued déchaîne les foudres des souvenirs de la camaraderie façonnés sur les bancs d'école, sur les placettes du quartier, dans les halles d'immeuble ou sur les terrasses mises à disposition le jour de buanderie. On vérifie tous les jours ce lien qui nous uni et qui confirme notre appartenance à une même fratrie. Avant on se comptait, désormais à nos âges on se décompte,et lorsque l'un d'entre nous est plongé dans la peine par un deuil, des messages de sympathie affluent de l'Europe entière, des USA, du Canada, d'Afrique du Nord, d'Israel, de la Réunion,...tout simplement pour témoigner à la famille parfois inconnue notre totale solidarité.

Notre peuple est inéluctablement en voie de disparition; aussi, reculons le plus longtemps possible l'échéance de notre dernier des Mohicans, préservons le ciment magnifique qui relie le peuple de Bab el Oued d'avant 1962 et lui donne la plus belle des parures du genre humain: la fraternité.

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