Né à Bab El Oued - 1948 - ALGER

 

Bibliothèque des trois horloges

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Pierre-Claude FASANO

Le : 02/10/2009 22:24

Bonsoir a toutes et tous. Oui nous sommes de retour,j'ai attendu 47 ans, jour pour jour, pour revoir mon PAYS de naissance,j'ai quitté la cité de la consolation, le 2 octobre 1962, et je reviens d'ALGER a la même date,accompagné de mon épouse et du groupe formidable dans lequel nous etions. Tout d'abord un GRAND MERCI A Madame et Monieur CHENNENNOU ET RACHID des exemples de GENTILLESSE,de SPONTANEITE,cette HOSPITALITE que nous connaissons bien sur, font que nous devons leur dire encore un GRAND MERCI.Notre sejour a été trop court, impossible de tout voir, mais j'ai obligé mon épouse de monter chez elle au 32 bis de la rue Leon Roches, quel acceuil mes amis!!!!!!!!toute son enfance est passé au crible dans le 2 pieces, PROPRE, NICKEL, café gateaux, mais il fallait partir( les horaires du bus a respecter)Merci a cette famille; ensuite chez moi avec Christiane, mon Ami Georges MORALI, et une autre AMIE, Cecile VIVES,la chance etait avec moi, le locataire de mon 6eme étage etait dans la rue, un attroupement instantané autour de moi et la joie de revoir cet appartement, un 2 pieces cuisine wc et un balcon de 15 m. rien d'extaordinaire, mais c'etait chez nous, et cette mer a perte de vue, une Famille extraordinaire a fait de moi l'homme le plus heureux de la terre, l'espace d'une heure, j'aurai du manger tous les couscous de l'immeuble dans la même soirée, toutes ces meres de familles sortaient sur les paliers, pour voir le petit Pied noir qui revenait, SOYEZ LES BIENVENUES CHEZ VOUS et puis la surprise,une Amie Algerienne qui habite au 68 est descendu dans la rue, a damandé a mon épouse qui j'etais? c'est pierre-Claude Fasano, mon mari! pleure que j'te pleure, la joie, la folie, les embrassades, indescritible.La plage L'EDEN? une desolation, que s'est-il passé? je ne saurai l'ecrire!!; Quand a BAB-EL-OUED, notre quartier tant aimé, il faudrait rester une bonne semaine pour tout voir, les constructions nouvelles sont tres importantes, et la population est en tres grand nombre. Mes remerciements vont aussi a notre guide NOUREDINE dit NOUNOU, un gars exceptionnel et aussi a notre chauffeur du bus qui, croyez moi a accompli des miracles, il n'a pas volé sont permis, il faut être tres fort pour conduire a ALGER, une veritable fourmiliere, il doit y avoir autant de voitures que d'habitants. Voila mes cher(e)s ami(e)s, un résumé de ce voyage qui ne sera pas le dernier, je l'éspére de tout coeur. Bonne nuit et A++

Mourad MALKI

Le : 06/07/2009 22:23

Bien le bonjour aux enfants de BAB EL OUED,

... ... Que d'émotions, que de chagrins, que de joies de retrouver notre bab el oued, plus de cinquante ans ont passé mais plus rien n'obstrue l'image de mon enfance à la rue Leon Roche mon primaire, l'avenue de la Bouzaréah mon quartier, PAPALARDO un habituer, la manifacture MELIA et les cigarettes JOB le voisinage, la brasserie la PRINCESSE avec son esplanade mes glaces, les consolations les trois orloges mes loisirs, la goutte de lait ma pouponnerie , la rue maxime noiret avec ma trotinette, le cinema richelieux mes films coboyes le rialto à la bazetta , la rue normandie ma maternelle, les petites soeurs des pauvres pour mon gouter, la clinique DURANDO pour ma naissance... ... Autant de souvenirs , a plus jamais quoi ce soit ne peut les effacer , c'est des sentiments fort, tres fort pour pouvoir vous expliquer ce que je ressens en vous tracant ces lignes , je me verse cinquante ans en arriere et me voila avec des larmes des larmes qui n'arretent pas de couler avec le sentiment d'une nostalgie infinie... BIEN FRATERNELLEMENT ET SINCEREMENT A VOUS MOURAD

Josiane MOLTO

Le : 30/06/2009 19:09

Evasion

En ce mois de juillet, j'entrouvre la porte de ma mémoire et je te contemple toi, ma ville. Un à un les rideaux de brume se sont déchirés et tu apparais toute de blanc vêtue dans le chaud soleil du matin. Tes rues et tes avenues fraîchement arrosées scintillent et d'un bout à l'autre de la baie tu t'étires, tu te réveilles.

De Bab El Oued à Hussein Dey tes marchés vont s'animer, tes boutiques vont lever leurs rideaux, tes cafés vont sortir leurs fauteuils et tes plages leurs parasols. Ton amie la mer que l'on voit à chaque coin de rue t'envoie son parfum d'iode et vient se frotter à tes côtes comme un petit chat en quête de caresses. Maintenant que tu es tout à fait éveillée, tu t'agites, tes hommes partent travailler, tes femmes font leur marché, tes enfants jouent dans les rues ou sur les terrasses et ta jeunesse est à la plage.

Tu es heureuse, ma ville, entre tes bras tu enserres tout ce monde coloré et gai et tu lui apportes la joie de vivre. Tu me manques, toi ma ville, toi mon amie, toi ma complice des bons et des mauvais jours, tu me manques, toi ma capitale, toi mon beau souvenir, toi... Alger.

Josiane MOLTO

Josiane et Raymond MOLTO

Le : 06/06/2009 13:42

Pour toutes les mamans.

Au matin, tu es la pour nous protéger

Nous réconforter quand on a mal

Nous cajoler quand on a du chagrin

Tu nous donnes la force de grandir

D'apprendre en toute innocence

De nous encourager dans nos moments de faiblesse

Au midi, on te fait enrager

On te donnes des cheveux gris

Mais tu es toujours la pour nous

Quand on fait des erreurs

Tu ne nous juges pas

Tu nous aides a nous relever

En soirée, tu guides nos pas

Tu éclaires nos moments de noirceurs

Tu nous tends la main dans le besoin

Dans la nuit, nous te chérissons

D'avoir pris soin de nous

Maintenant c'est a notre tour

MERCI MAMAN

Mourad MALKI

Le : 04/06/2009 22:55

bien cher ami christian,

je t'envoie une bouffé d'ai de notre cher BAB EL OUED,ce message est bien enregistré d'un lieu c que tu connais certainement bien non loin de la clinique DURANDO as tu connu? L' avenue bouzarea la limonaderie DEDE non loin de la place du triolet garage denis la basetta le cinema rialto la carriere jobert climat de france ... Ce sont des souvenirs emouvant en vous lisant ces les années cinquaznte que je rememore et je reste bien fiere de te lire je peux te rzaconter un tas de choses je reste un nostalgique un fervent nostalgique de l'algerie francaise j'y pleure bien souvent les souvenir que tu viens de me devoilés ont une importance capitale dans mon coeur car j'y reste modeler de cette mentaliter qui m'a bercer dans de beaux jours ... Merci encore christian je tache rez de tr'ecrire s 'il le faut cet e mail en es un faux que j'avais inventé à la hate pour t exprimer ma profonde admiration pour ton message merci encore MOURADO

André TRIVES

31 MAI 2009: BAB EL OUED ressuscité.

Les platanes centenaires du Grand St Jean ont donné aux anciens de BAB EL OUED la plus belle émotion que la terre pouvait leur offrir ce jour-là. Des Etats Unis, de Suède, d'Angleterre, du Maroc, d'Espagne et de toutes les régions de France, ils sont venus, couverts de rides et de cheveux neigeux, l'oeil toujours pétillant, se retrouver en mendiants de fraternité sous la bannière flamboyante du quartier de leur enfance.

Sans se concerter et dans une harmonie parfaite, les platanes ont été transposés en forêt de Sidi Ferruch traversée par le flonflon des guinguettes. L'espace boisé se voyait religieusement arpenté dans sa longueur par la foule retrouvant les "andar et venir" de l'avenue de la Bouzaréa. Chacun dans sa procession léchait un créponné d'Amitié, seule la drague disparue.

La clique des Messageries, la rue Léon Roches, la Bassetta, La Cité des Vieux Moulins, le quartier Rochambeau-Nelson, la rue de Phalsbourg, l'avenue Malakoff, La Place Lelièvre,Sigwalt, Notre Dame d'Afrique, tous avaient tenu à ne pas être oubliés. Toutes les rues faisaient le pari de retrouver un ami ou un voisin. La notion du temps avait disparu, seules nos années en noir et blanc avaient de l'importance.

Les mantécaos,la calentita, la soubressade, les cocas à la frita la kémia et l'anisette se partageaient pour apprécier les saveurs d'antan.

Les bénévoles de l'ABEO et son Président Raymond PALOMBA, avaient mis à disposition tous les ingrédients pour que la fête soit une réussite. Jusqu'à confectionner une oeuvre monumentale refaite à l'identique par les ouvriers de l'amour du quartier, MULLOR ET FASANO: LES TROIS HORLOGES; mitraillées tout au long de la journée par des milliers de photographes.

En fin de matinée, comme d'habitude, quelques nuages venus de tous les cimetières de France et d'Algérie assombrirent les retrouvailles au travers des feuillages. Et comme d'habitude, quelques gouttes de pluie traduisirent l'affection qu'ils portaient à leurs petits. Le retour spontané du soleil nous redonna dans l'instant un sentiment mêlé de tendresse et de tristesse.

Très tard, alors que l'astre de lumière déclinait à l'horizon plein ouest, la fin de cette journée exceptionnelle vint trahir la communion fraternelle qui avait pris ses répères.

Punaise, que c'était beau tous ces sourires et toutes ces joies qui étaient venus illuminer des visages burinés par le temps. Durant quelques heures nous nous étions sentis solidaires et de nouveau invulnérables. Nous savions que demain allait recommencer notre exil et notre isolement dans nos appartements luxueux de vie accomplie.

Nous attendrons patiemment l'an prochain pour retrouver cet essentiel que seule la famille de BAB EL OUED peut nous faire revivre désormais.

Enfants de BAB EL OUED, AU REVOIR, SHALOM, SALAM et à l'an prochain.

André TRIVES

Le : 11/05/2009 18:29

Noces de BAB EL OUED à TIPASA

J'ai toujours ce besoin incontrôlable de trifouiller dans l'enregistrement de ma mémoire ancienne pour retrouver la salle des archives qui contient tous les souvenirs, les bons et les mauvais. Je pousse la porte grinçante qui me rappelle que cela fais bien longtemps que je n'y suis venu. Dans la pénombre, sans hésitation, je me dirige vers un rayonnage couvert d'une épaisse poussière, et sur l'étagère branlante je saisis la bobine qui renferme les images en noir et blanc d'une inoubliable sortie éducative à la découverte des ruines romaines de Tipasa organisée par notre instituteur du CM2 de l'école de la Place Lelièvre: Monsieur Benhaïm. C'était il y a bien longtemps, 56 ans je crois, et pour moi c'était hier.

Avec l'ensemble des camarades, nous étions excités à l'idée d'aller découvrir ce site historique, et par le fait de ne pas avoir classe ce jour là. Il faut dire aussi, que pour la majorité d'entre nous, partir en véhicule à moteur loin du quartier, était un véritable baptême.

Dès sept heures, on avait pris place dans l'autocar garé rue Jean Jaurès, et Monsieur Benhaïm, tel un épicier vérifiant sa comptabilité, pointait et repointait les présents pour n'oublier personne. Un cri collectif de libération salua le départ et nous regagnâmes le littoral en chantant comme un seul homme toutes les rimes en "A" de notre pataouète: " Faire un tour en pastéra" lança Ferrer pour débuter; et tout le car reprit en coeur:" C'est tata, c'est l'algérois". " Manger de la calentita", cria-t-il à nouveau; amenant à l'unisson la même réplique:" C'est tata, c'est l'algérois". "Monter la côte de la bassetta", " La figa de ta ouella", toujours le même coeur avec les veines du cou prêtes à éclater:" C'est tata, c'est l'algérois". L'énergie débordante et les cris d'exhaltation se calmèrent subitement lorsqu'à hauteur du stade Marcel Cerdan, nous fûmes pour un court instant, muet d'admiration: le boulevard et la mer, côte à côte dans un joue à joue sinueux, déroulaient en perspective des cartes postales animées que nous commentions le nez collé à la vitre.

" L'Eden, l'Eden! Oh, là-bas la pastéra, regardez là, la pastéra!" En contrebas de la route, un pêcheur souquait ferme pour rejoindre le palangre posé à quelques encablures de la plage déserte. Le voyage allait être long. Pour beaucoup plongés dans la fascination, les yeux écarquillés par tant de tableaux de maître, ils découvraient pour la première fois d'un piédestal mobile, la beauté insoupçonnée de leur pays. L'émerveillement était à son paroxisme; l'album de photos en couleur défilait en continu sur l'écran transparent qui avançait. Notre appétit de découverte n'imaginait pas enregistrer pour toujours dans nos mémoires de citadins, le charme exceptionnel de ce coin d'Algérie où la nature ne pouvait échapper à l'omniprésence de la mer. On venait de quitter Bab el Oued et la ville, et déjà, Saint-Eugène, posé comme un balcon sur le large, nous en mettait plein les yeux. Nos deux quartiers limitrophes, unis comme les doigts de la main avaient en commun la protection divine de Notre Dame d'Afrique érigée en vigie au sommet de la colline. Entre Raïsville et le Parc aux Huitres, les façades s'alignaient fièrement comme des amandiers en fleurs dans la pente qui longeait le boulevard surplombant les plages et les calanques. Les consructions se dressaient avec pudeur à l'abri du soleil et des regards derrière des jardins arborés de figuiers et de néfliers. Les fenêtres fixées sur l'horizon azur cueillaient une vue imprenable; elles semblaient se faire la courte échelle pour ne pas manquer une seconde de l'impacte des saisons. De ces nids de verdure embaumés de jasmin, on ne pouvait rater les couleurs que la mer étalait durant la journée: au bleu gris du matin succédait un bleu nacré qui annonçait le triomphe du bleu turquoise de midi. Le bleu lumineux se faufilait dans les contrastes de lumières de l'après-midi avant de faire place au bleu d'encre de la nuit. La permanence du sublime ne pouvait laisser indifférent. On aurait pu raconter Saint-Eugène à la manière d'un conte de fées bien réel qui aurait pu commencer ainsi: " Il était une fois un village aux fleurs parfumées d'iode avec des balcons galbés de lilas suspendus, des vérandas drapées de cascades de bougainvilliers rouges violacés et des terrasses écrasées de soleil avec des linges blancs claqués par le vent du large, donnant l'impression de saluer inlassablement le va-et-vient des marins". Les Saint-Eugénois étaient sans le savoir, les acteurs d'une pièce de théâtre maritime perpétuée depuis des générations où chaque matin un hymne à la joie les réveillait.

Les criques, les rivages de sable blond, les ilots s'enfilaient comme des perles, à la queue leu-leu sur tout le bord de mer. La beauté n'était pas radine, et à midi plein elle scintillait de mille éclats. En quelques virages, on était bien loin des agitations de notre faubourg, du brouhaha incessant du marché, du tintamarre grinçant des tramways et du vacarme lancinant des moteurs et des klaxons qui envahissaient de plus en plus nos rues. La liesse enfantine qui perdurait ne cessait de commenter à haute voix le déroulement du trajet: Sebaoun s'écria:" Raïsville, et un cornet de frites, chaud bien chaud!". Lebon enchaîna:" Le stade, dimanche quand Stépanoff a marqué, on a crié "iiiiilllll'yyyyéééé", les morts au cimetière ils ont bougés". Ayache repris:" La salle des Fêtes, pour le mariage de ma soeur on a fait la bombe à tout casser". Quittard renchéri:" Le Petit Bassin, ici putain on fait des oursins maousse comme des assiettes". Solivérès lança:" Les Deux Chameaux, j'ai un copain, il nage sous l'eau la tête sans respirer du Fauteuil au Charlemagne d'un seul coup." Lozano s'enthousiasma:" Le Parc aux Huitres, mon père il attrapé un poisson gros comme une baleine". Labianca interrogea:" Ma parole, comment t'y a fait pour le mettre dans le four ?" Amara expliqua: " Lavigerie: mon frère il a fait une pantcha du plongeoir de la corniche, il est resté mort dans l'eau un bon quart d'heure".

Dans l'excitation du parcours qui commençait, le groupe était intarissable et chacun voulait exprimer une part de son vécu; comme tous les enfants, nous avions le sentiment d'être le nombril du monde.L'euphorie se partageait de part et d'autre du chemin. Sur la droite, la brume matinale de l'été roulait des fumées opaques jusqu'aux limites de l'horizon. Comme un rituel, le solel embrasait le large pour commencer la journée et la mer dans sa tunique bleue clapotait contre les rochers la douce mélodie des vagues entre l'Eden et les Bains Romains. De partout, des cabanons sobres et modestes, vaporisés d'embruns salés et agglutinés en grappe sur des épérons, se miraient dans les eaux dansantes comme par coquetterie. Ici, ce n'était pas le paradis, mais il lui ressemblait beaucoup. Les ilots de Baïnem-Falaise, dressés comme des remparts sur les eaux argentées, affrontaient allègrement l'écume de colère des tempêtes hivernales. La côte dans sa totalité s'ouvrait en toute innocence aux assauts de la haute mer. Dans le lointain du phare de Cap Caxine, des guirlandes de fumées noires dans le sillage d'un paquebot à destination de terres inconnues maculaient le ciel de rêves incertains. En traversant Guyotville, Jeandet, garçon malingre et rieur déclara:" En août, La Madrague c'est une réserve de Peaux-Rouges, y stappe la gazouze les pieds dans l'eau et la tête coincée dans les baleines du parasol". Les bavards de la classe avaient confisqué la parole et seuls les rois de la tchatche s'en donnaient à coeur joie pour exprimer le trop plein qui bouillait en eux. Le seul lieu connu detous qui fit l'unanimité fut Sidi Ferruch, lieu mythique que fréquentait tout Bab el Oued lors d'excursions traditionnellement organisées les lundis de Pentecôte et de Pâques ainsi que le 15 Août. Le souvenir historique du débarquement de 1830 était loin de nos pensées, seul la forêt des plaisirs que l'on partageait en famille et entre amis depuis des lustres avait un sens et les noms qui nous faisaient vibrer étaient: le Robinson, le Normandie, la plage Moretti et le vivier.

SUITE DE CE TEXTE PROCHAINEMENT SUR CETTE MESSAGERIE

Le : 18/05/2009 17:01

NOCES DE BAB EL OUED A TIPASA (suite du 11 mai dernier)

Toutes les bourgades traversées déclaraient avec fierté leur union à la mer: Daouda-Marine, Fouka-Marine, Castiglione et son aquarium. Un sardinier de retour de pêche avec des hommes affairés sur un monticule de filets, franchissait la passe du port de Chiffalo suivi par les cris d'une nuée de mouettes rieuses affamées. Le spectacle maritime sur notre droite, ne nous faisait pas perdre une miette de la vie rurale qui défilait sur notre gauche, de l'autre côté de la route.

La plaine côtière se découpait en damiers successifs de terres cultivées de légumes et d'agrumes protégées de claies de roseaux et d'espaces caillouteux tapissés de buissons épineux, d'acacias sauvages et de végétation jaunie par la sècheresse. Quel contraste avec les jardins d'hibiscus rouges et d'iris bleus au centre des villages où la profusion de roses accrochées aux façades donnait aux maisons des allures de chars en compétition pour un corso fleuri. La seule ombre au tableau de ce florilège d'images qui donnait à l'été ses couleurs de vacances, c'était l'usine des ciments Lafarge qui dressait dans le ciel de longues cheminées fumantes, juste dans la descente après le Casino de la Corniche en direction d'un petit joyau qui avait pour nom: la Pointe Pescade.Mieux que dans un film, la bobine déroulait une magnifique pellicule de scènes et d'images avec en prime les couleurs de la réalité. A Zéralda, près des Sables d'Or, un groupe de travailleurs échangeaient des rires complices et se désaltérait sous le jet d'une gargoulette à l'ombre d'un caroubier. Un peu plus loin, à la sortie de Tefeschoun, un char à banc se frayait un passage chaotique dans les ornières d'un chemin de terre et transportait des ouvriers agricoles enturbannés dans les champs. A l'orée du village de Bouharoun réputé pour son eau minérale,en bordure d'un champ de céréales, une moissonneuse-batteuse dissimulée dans un nuage de poussière, crachait en saccade des fumées pétaradantes et alignait alternativement sur le côté une botte de paille et un sac de grains. Un peu plus loin, dans les rangs de vigne qui épousaient la pente d'un coteau, un chasseur, fusil en bandoulière, dans le pas de ses chiens, avançait à découvert dans les mottes de terre encore humide de rosée. Partout des collines boisées de chêne-liège et de pins maritimes, jouaient à saute-mouton de loin en loin dans la découpe du ciel immaculé; elles préservaient un peu d'ombre dans la fournais de cet été interminable traversé pr la stridence des cigales. En somme, de notre car transcendé par la liesse enfantine, nous assistions à rien de plus qu'à des moments de vie bannale qui faisaient notre Algérie et dans laquelle on était si bien. Comme dans n'importe quelle région du monde, une journée ordinaire chez nous, ne pouvait se défaire de l'ambivalence humaine à la fois fraternelle et égoïste où charme et disgrâce s'accorde avec pile ou face.

Seulement voilà, dès les prémices du printemps la nature qui se pomponnait des couleurs de l'arc-en-ciel, nous ennivrait d'Algérie. Les amandiers en fleurs badigeonnés de crème fouettée ouvraient le bal des émotions et la campagne dans un sursaut d'imagination répliquait avec les tâches rouge-sang des coquelicots qui, sous l'impulsion de la brise, dansaient au rythme d'une danse espagnole. Le ballet de jouvence se poursuivait avec le jaune cérémonie des boutons d'or qui scintillaient sous les rayons de midi comme des lucioles virevoltantes dans l'obscurité de la nuit. Le souffle d'un air tiède ondulait les tapis fleuris disséminés sur la nappe blonde des blés dans un mouvement perpétuel de va et vient tels le flux et le reflux de la vague le long de la grève. On pouvait penser que le Grand Architecte de l'Univers, artiste-peintre à ses heures perdues, sublimait ses émotions en gambadant sur la terre de chez nous. Le vent vorace inspirait à pleins poumons l'envol des pollens et restituait avec générosité l'odeur des roses, du jasmin et du romarin qui s'imposait ici comme une marque de fabrique. Les coins enchanteurs de cette Côte Turquoise se succédaient telle une pièce de théâtre en plusieurs tableaux où, les spectateurs charmés espèrent que la fin n'arrive jamais pour ne pas détruire le rêve éveillé qui les régalait. De criques tourmentées d'à-pics aux étendues de sable fin parsemées d'algues séchées, de vignes aux raisins muscat gorgés de sucre aux champs labourés de sillons à perte de vue, nous fûmes brusquement saisis dans le lointain entre Marengo et El Affroun, par des alignements d'orangers, de clémentiniers et d'oliviers qui brodaient la plaine de la Mitidja. Soulevant dans l'autocar de l'admiration:"C'est immense, ça nous change du Beau Fraisier et de la Campagne Jaubert". Enfin, Tipasa parfumée d'iode nous apparu dans un havre de beauté prodigieux bordé en tout lieu par le bleu nacré de la mer. Sur la gauche fermant l'horizon, le massif du Chenoua dressé en bouclier, préservait le port des caprices du vent qui désormais, forcissait et moutonnait la crête des vagues venant du large, d'un diadème de première communiante. Nous étions cloués d'émerveillement comme devant un cadeau de Noël. Nous nous apprêtions à visiter un patrimoine de ruines et de monuments anciens figé dans un écrin de verdure que les "colonialistes" Romains ( citation que les Berbères Chrétiens et juifs ont dû employer à l'époque, non?)laissèrent à la postérité dans notre pays.

L'excursion se fit au pas de course sous le chant stridulant des cigales que le vent colportait en blanchissant d'écume les caps de Ste Salsa et du Forum. Les oiseaux en concert répliquaient leur partition à à la cime des arbres, créant une ambiance de gaîté et de joie. Dans ce site majestueux embaumé des parfums d'armoise et de lentisque, les Dieux romains avaient probablement été eux aussi éblouis et fascinés par tant de beauté. N'étaient-ce pas des noces qui se célébraient aujourd'hui entre l'innocence de ces enfants venus de Bab el Oued et l'attrait sublime de cette nature éternelle. Quelques années auparavant un jeune écrivain promis à un brillant avenir, Albert Camus, avait écrit:"Noces à Tipasa" comme un cri d'amour à toutes ces merveilles qui nous entouraient.

Nous suivions Monsieur Benhaïm qui s'efforçait de nous intéresser à l'histoire de la Catacombe des Evêques, du Mausolée Circulaire, de la Grande Basilique Chrétienne, des Grands Termes et de l'Amphithéâtre. Notre imagination sans borne nous faisait entendre les eaux de la Cascade de Nymphée et les cris de la foule enthousiaste dans le Petit Théâtre où le premier spectateur était la mer. Nous apprîmes en fanchissant les portes des ramparts protégeant la ville qu'à cette époque, Alger s'appelait Icosium et Cherchell: Césarée. La pause pique-nique se fit sur un quai du port où nous partageâmes "omblettes de pon de terre", "cocas à la frita", "casse-croûte à l'huile frotté d'ail" arrosé d'un "sélecto Hamoud Boualem" et d'une limonade "Dédé". Et l'incroyable c'était que le banc de pierres sur lequel on déjeunait avait mille huit cents ans. Nous formions un cercle attentif autour de notre maître d'école qui mêlait le geste à la parole pour mieux expliquer les évènements historiques de la période romaine. Ce la n'empêchait pas les rangs arrières de se distraire, le nez levé au ciel pour suivre un vol noir d'étourneaux qui passait, ou cueillir à la hâte une poignée d'arbouses sucrées dans les genêts et les jujubiers sauvages qui jalonnaient le parcours. Monsieur Benhaïm nous expliqua que notre pays avait subit depuis ses origines, un mélange extraordinaire:" Mes enfants, nous dit-il, les véritables ancêtres de l'Algérie sont les Berbères; ensuite se succédèrent des colonialistes de tout le bassin méditerranéen: Phéniciens, Numides, Romains, Vandales, Byzantins, Arabes, Espagnols, Turcs et enfin nous les Français." Mélot provoqua des rires en lançant:" Qui prendra le tour suivant?" La journée à Tipasa s'acheva par un léger détour à travers des champs plantés d'amandiers qui nous mena dans une solitude sauvage au sommet d'une butte où trônait un tas de pierres architectural et impressionnant: le Tombeau de la Chrétienne. Une réalisation de l'époque barbare qui témoignait des hautes valeurs du peuple Berbère. Le retour fut tout autre. Finie la chorale impromptue qui ébranlait le car ce matin avec des "Plus vite chauffeur, plus vite chauffeur, plus vite."La fatigue était passée par là, et le ronronnement du moteur accompagnait la somnolence générale qui s'était emparée du groupe avant Bérard. Plongés dans la léthargie qui avait calmé les plus loquaces, nous revisitions dans nos pensées la page d'histoire de notre pays que nous venions de découvrir dans les pins et les tamaris aux troncs torsadés par le vent. Nous ne pouvions nous défaire de l'aquarelle de bleux lumineux accouplés à l'ocre des monuments qui s'était incrustée dans nos mémoires. Les pierres dressées, les arches, les arceaux et les colonnes Toscanes surmontées de chapiteaux à feuille d'acanthe qui encadraient l'horizon et la mer, formaient d'incroyables tableaux suspendus aux cimaises de la féérie pour l'éternité.

A l'arrivée devant chez "Coco et Riri", Papparlado annonça:"Icosium,Icosium, dernier arrêt, tout le monde descend" et les éclats de rires rappelèrent à nouveau la joie de vivre qui nous collait à la peau. Après tant d'années,surtout les jours gris sous la pluie, je repense souvent à cette admirale balade de lumière avec les camarades du CM2 sur la Côte Turquoise. La fresque sur Tipasa imprimée à jamais dans ma mémoire resurgit dans mes nuits agitées par ma "nostalgérie": la crête des vagues blanchies par le vent, le chant des cigales, l'odeur du jamin et de l'armoise, les accents et les amitiés. Je retrouve intacte la bravoure et l'humanité de Monsieur Benhaïm, qui ce jour là avait délaissé son habit guindé d'instituteur pour devenir le père et l'ami de tous les élèves.

Vous imaginez l'émotion lorsque six ans plus tard, ayant intégré l'Education Nationale, je recevais ma nomination d'enseignant pour l'école de la rue Léon Roches dans le quartier qui m'avait vu naître. Je frappais à la porte du bureau du Directeur pour me présenter. Je n'imaginais pas une seule seconde, que le Chef d'Etablissement qui allait m'accueillir était Monsieur Benhaïm, le maître du CM2 qui avait contribué à célébrer mes noces indéfectibles avec Tipasa. Je retrouvais l'homme qui ne parlait pas avec sa bouche, mais uniquement avec son coeur. L'étreinte et l'émotion furent à la hauteur de l'estime que nous nous portions.

André TRIVES

Le : 17/03/2009 19:08

A BAB EL OUED AU PRINTEMPS C'ETAIT L'ETE

Le premier bain de mer pris à Sidi Ferruch pour les traditionnelles fêtes de Pâques sonnait le départ d'un été qui allait durer six mois. Il se rappelait à nous sans ménagement sur le chemin brûlant parcouru pieds nus entre la forêt retentissante des flonflons de la fête au Robinson et au Normandie, et la plage Moretti jonchée de corps rougis tels des écrevisses ébouillantés.

L'été n'était pas seulement une saison chaude propice aux baignades et aux promenades tardives où l'on cherchait désespérément à la nuit tombée la caresse d'un air frais dans les rues du quartier; c'était aussi et surtout une période délicieuse de rencontres et de liberté retrouvées en toute chose.

Les fenêtres s'ouvraient en grand et captaient de nouveau les bruits habituels qui réveillaient les flemmards encore assoupi.Le roulement métallique des rideaux annonçait l'ouverture des magasins. Le camion de glace déposait sur le trottoir des pains blanchâtres qui sous l'effet de la chaleur effaçaient les traits à la craie d'une marelle que les enfants avaient dessinée la veille. Le camion poubelle avec son tintamarre remontait la rue poursuivi par les retardataires en robe de chambre brandissant un seau d'épluchures. Dans l'euphorie de l'arrivée du printemps qui tranformait radicalement les habitudes, Bab el Oued proclamait:" aujourd'hui c'est l'été".Désormais, on respirait à plein poumon l'air encore frais du matin imbibé d'une odeur d'iode qui montait de la mer après avoir emmitouflé de brume la bouée de Padovani. On partageait chaque soir avec les copains la procession rituelle d'amitié qui arpentait l'avenue de la Bouzaréa. On changeait ses habitudes vestimentaires en portant des linges légers aux teintes pastels moulant les poitrails dénudés de la jeunesse insouciante. On invitait le soleil à jouer les prolongations en nocturne avec l'empreinte rougeâtre laissée sur la peau. On refaisait le monde avec nos voisins dans des échanges amicaux au pied de l'immeuble, autour des vieux installés confortablement sur le trottoir.

Chaque matin les immeubles qui dominaient l'horizon assistaient à un concours de beauté entre le bleu nacré de la mer et le bleu lumineux du ciel, célébrant leur union dans la baie entre El Khettani et Raïsville. En somme, notre vie avait patiemment attendu le court passage de l'hiver qui ne craignait pas le ridicule pour s'articuler désormais un climat exceptionnel de douceur que la nature nous accordait en toute insolence.

La joie se communiquait dès le réveil avec les piaillements des oisillons affamés qui s'échappaient des feuillages immobiles; amplifiée par le chant des oiseaux qui galvanisait l'ambiance endormie du jardin Marengo. A leur manière ils saluaient les premiers rayons du soleil et indiquaient à tout Bab el Oued que la journée, comme de coutume, serait magnifique de tiédeur. Pour ceux qui se levaient tôt, le spectacle prenait forme au dessus du damier rouge des terrasses avec le vol ininterrompu des martinets traçant à l'encre noire des arabesques éphémères qui décoraient le ciel d'azur d'une sorte de tonnelle en fer forgé reliant les collines de Notre Dame d'Afrique et du climat de France. Comme chaque matin, une odeur de café se répandait dans la maison.Mon père se préparait à partir au travail; la rencontre pour quelques instants dans la cuisine autour d'un bol de lait fumant faisait partie du rite familial. Rite qui devenait divin lorsque sur la table la traditionnelle "mouna" venait récompenser la longue attente de cette odeur suave qui envahissait l'appartement à chaque fête de Pâques. Je disputais à mon frère le dernier morceau devenu orphelin dans l'assiette; le perdant se contentait des miettes au fond du plat. Je me débarbouillais à la hâte au robinet d'eau froide de l'évier en pierre. Je vérifiais le contenu de mon cartable et le bon état de la plume Sergent Major, puis je dévalais les escaliers à tombeau ouvert pour ne pas arriver en retard à l'école.

A hauteur du boulevard de Provence, j'observais en passant l'agitation des adultes qui regagnaient leur boulot. La noria de tramways déversait et reprenait la foule des travailleurs, le front déjà perlé de sueur, qui suivaient pas à pas les zigzags de la chicane pour s'entasser dans la rame comme des sardines. Ils s'agrippaient à la lanière de cuir fixée au plafond pour assurer leur équilibre; et les plus malins se glissaient à l'arrière d'une voisine agitant un éventail pour bénéficier d'un souffle d'air salvateur.

A l'angle de la rue des Moulins et de la rue de Chateaudun, je frôlais le marché qui servait déjà les ménagères matinales venues pour éviter la chaleur écrasante qui s'installait peu à peu.Vu d'avion, le marché de Bab el Oued ressemblait à un grand tapis artisanal de Kabylie composé d'un patchwork de parasols, de toiles et de couvertures multicolores tendus pour se protéger de l'ardeur du soleil. La marche serrée et à pas lents de la foule qui tournait autour de ce temple de la ménagère, souvent dans le même sens, semblait relevé d'une quête religieuse dont les Trois Livres accordaient l'abondance à un don du ciel. J'arrivais à l'école de la place Lelièvre trempé de sueur, je gravissais les cinq marches de pierre usée sous le regard de Monsieur MASSE fumant sa pipe; le rassemblement dans la cour pour quelques instants, couverts par les cris des élèves excités, s'imposait à l'ombre du préau. Lorsque dans la matinée, la volée de cloches de l'église St Joseph nous forçait à fermer les fenêtres, l'atmosphère de la clasee devenait irrespirable. A midi, lorsqu'il avait rejoint le zénith, l'astre de lumière devenu de plomb régnait en maître dans les rues du quartier pour un long moment; nous obligeant à circuler sur les trottoirs caressés par l'ombre des immeubles. Une chaleur moite vous saisissait sur tout le corps, la torpeur s'installait dans les rues, la vie se déroulait au ralenti.Alors, la phrase la plus prononcée était: " J'suis en nage".

( Suite de ce texte prochainement, dans la mesure où les histoires de mon enfance ne vous cassent pas les pieds)

Le : 22/03/2009 17:22

A Bab el Oued, au printemps c'était l'été !

(Suite du récit paru le 17 mars dernier)

Trouver un coin à l'abri des rayons brûlants devenait une urgente préoccupation. Régulièrement à midi pile, une fois par mois, le son assourdissant de la sirène située sur un immeuble des Messageries, ébranlait les murs des maisons et remémorait tristement à nos parents les affres de la dernière guerre. Tous les après-midis entre quinze et seize heures, alors que le coup de chaud était à son maximum, suite au rangement des étals des marchands le long du marché couvert et au passage énergique des balayeurs tirant leur charreton-poubelle, on attendait avec impatience le passage de l'oasis itinérante: l'arroseuse municipale. Elle remontait lentement la rue des Moulins avec son jet vaporeux et créait un nuage de fumées blanches qui persistait sur l'asphalte fondu à la manière d'un brouillard londonien. C'était le moment où le soleil avait perdu la raison. Une kyrielle d'enfants pieds nus, criait leur liesse dans le sillage du camion. La douche en pluie fine qui les accompagnait dans leur course les transportait de joie. J'étais assis sur la première marche du magasin de mon père où j'avais pris la précaution d'ôter les espadrilles; face à moi, Omar le charbonnier en avait fait de même. Nous vivions ensemble avec un sourire complice, sans se parler,ce moment divin qui ponctuait nos après-midis d'été à la rue des Moulins. Nous aurions aimé, nous aussi, courir derrière cette source itinérante, mais nous savions que demain comme aujourd'hui, ce plaisir arriverait de nouveau à nos pieds.

Conforme à ses habitudes l'été nous faisait sentir qu'il nétait pas là pour jouer dans la même division que les autres saisons. Il s'imposait dès le printemps certes, mais il nous réservait de terribles surprises avec les canicules de juillet et août, accompagnées parfois d'un nuage de criquets pèlerins et de sauterelles qui noircissait entièrement le ciel de Bab el Oued. Avec ce couvercle de noirceur vivante, le quartier devenait une véritable marmite où le seul mot d'ordre était:"fermez les fenêtres". Le ciel s'assombrisait soudainement comme pour la venue d'un gros orage. Le phénomène nous procurait en quelques minutes,une éclipse de soleil. Certains de ces insectes surnommés "matcho" mesuraient une bonne douzaine de centimètres. Cette invasion inattendue s'abattait en piquée dans les rues et s'écrasait contre les vitres en déposant le liquide jaune-vert de leur abdomen éclaté. La situation offrait à tous les enfants et pour plusieurs semaines la matière des jeux et des farces inoubliables. Les rires gagnaient la cage d'escaliers des immeubles où l'ouverture de sa boîte aux lettres pouvait réserver une surprise avec une dizaine d'intrus affolés qui vous sautait au visage. Même perturbation en classe lorsque les sauterelles nous envahissaient avant la fin juin. Elles arrivaient en classe en cartable ou dans des boîtes en carton et participaient au fou-rire général lorsqu'un élève récitait la fable:" La cigale et la foumi". Vous imaginez l'ambiance lorqu'une centaine de sauterelles retrouvaient leur liberté dans la classe. La cour de récréation se transformait en un immense laboratoire scientifique de dissection. On sectionnait les couteaux arrières et on attelait les sauterelles à des boîtes d'allumettes afin d'organiser des courses. Si quelqu'un avait la mauvaise idée de s'enfermer dans les toilettes par obligation, il avait droit au contenu entier d'une boîte de chaussures pleine de criquets qui le faisait jaillir du petit endroit comme un diablotin sur son ressort. Dans la rue, le cantonnier en nettoyant le caniveaux créait une rivière torrentielle et le jeu consistait à faire naviguer sur des radeaux en bouchon de liège sa sauterelle de compétition le plus longtemps possible. Ah, le jour où on offrira à nos enfants pour Noël un jeu de sauterelles!

C'est au Sahara que se concoctait les coups de sirocco qui nous cloîtraient dans les maisons toute l'après-midi. Dans la pénombre des volets clos, les enfants, torse nu, en slip ou en cuissette, s'allongeaient tels des lézards dans un corps à corps langoureux sur le carrelage imprégné d'une odeur résiduelle de javeL, à la recherche d'un peu de fraicheur. Les virevoltes agaçantes d'une mouche entrée subrepticement perturbaient la tranquilité jusqu'à l'exaspération; le brin de sieste auquel ils étaient impérativement conviés ne venait que rarement. La sortie pour "prendre le frais" en soirée visait deux directions: soit le boulevard du front de mer pour capter une brise inespérée entre Padovani et l'Eden, sot les glaciers du quartier qui rafraichissaient les gorges desséchées de crèmes espagnoles ou italiennes achetées à la Princesse, chez Di Méglio, Roma-glaces ou Grosoli. Alors les avenues de la Bouzaréa et des Consulats ne désemplissaient plus d'une foule d'habitués, petits et grands,qui déambulait avec un cornet de glace dégoulinant à la main.

( Suite de ce récit prochainement)

Le : 25/03/2009 16:53

A BAB EL OUED AU PRINTEMPS C'ETAIT L'ETE

(suite et fin des récits parus les 17 et 22 mars)

Dans les années d'après guerre, le repas du soir réunissait à heure fixe la famille autour des parents et se prenait en respectant la précaution d'usage: portes et fenêtres grandes ouvertes à la recherche d'un courant d'air qui servait le rôle de ventilateur naturel. La soupe qui fumait dans nos assiettes rendait nos fronts luisant de transpiration et la moiteur ambiante gratifiait bien souvent les jeunes de refroidissements et de maux de gorge affectant plus particulièremnt les amygdales.

La chaleur s'installait dans la durée et nous portait à appliquer des idées héritées de coutumes ancestrales pour la rendre moins cruelle. A l'ombre des persiennes closes, sur le rebord des fenêtres, une bouteille enveloppée dans un linge humide, servait à se désatérer tout au long de la journée en buvant l'eau à la régalade. L'avantage n'était pas tant dans l'eau fraîchie que l'on ingurgitait, mais dans l'aspersion du corps qui en résultait. La conservation de la motte de beurre que l'on achetait au détail gardait sa consistance à condition de la placer dans une terrine remplie d'eau que l'on déposait dans un garde manger ajouré d'une moustiquaire. A cette époque, les mamans allaient au marché et dans les petits commerces tous les jours. Elles achetaient le stricte nécessaire aux repas de la journée. Les produits frais comme le poisson ou la viande se consommaient le jour même. Le vin acheté au détail s'aigrissait sous quarante huit heures. Les fruits et légumes fragiles ramollissaient en compote sous quelques heures s'ils restaient empiler dans le couffin. Tous les après midi sur le coup de cinq heures, le son d'une trompette en roseau annonçait l'arrivée du laitier Monsieur Micaleff qui vendait sur le trottoir le lait qu'il venait de traire dans l'étable située au Beau Fraisier sur les hauteurs du quartier. Au retour à la maison, il était vivement conseillé de le faire bouillir en trois montées successives, sinon il tournait et n'était plus consommable au petit déjeuner du lendemain matin. Alors, le lait devenu caillé servait avec du sucre à un dessert de circonstance. Mais cet été qui n'en finissait pas, nous accordait des moments agréables: finie l'obligation de chauffer la grande casserole d'eau pour prendre son bain dans la cuvette émaillée; désormais l'eau à température naturelle du robinet nous contentait pour plusieurs mois. Seule la vénérable glacière, tapissée à l'intérieur de zinc nous fabriquait du froid et conservait les aliments sur deux à trois jours, à condition de l'alimenter quotidiennement d'un morceaude glace acheté chez le marchand de vins. La corvée de glacière consistait à vider chaque matin l'eau de la fonte contenu dans le tiroir au bas du meuble; si par négligence l'opération n'était pas régulièrement respectée, une inondation gagnait la cuisine où éponger, essorer, écoper, essuyer et nettoyer n'était pas de vains mots.

Le repas était certes pris en famille, mais il ne durait pas longtemps,car chacun avait hâte d'aller sur le balcon à la recherche d'une brise qui aurait accordé ses faveurs. Excepté le dimanche soir à vingt et une heures précises où, après le dîner, toutes les familles de Bab el Oued se retrouvaient dans un silence religieux autour de la TSF pour écouter sur Radio-Alger une émission captivante:"Les maîtres du mystère". Cette émission créait des peurs et des angoisses aux enfants; mais être réunis en famille au cours d'une belle nuit d'été à Bab el Oued, avec la protection de ses jeunes parents,dans l'amour et l'insouciance, c'était sans le savoir le plus beau moment de la vie.

Ainsi, parents et enfants se retrouvaient jusque tard dans la nuit assis en tailleur sur le balcon. Les poignets travaillaient énergiquement en secouant éventails et feuilles de carton pour obtenir un déplacement d'air bienfaiteur. Les conversations avec les voisins se faisaient à voix basse pour ne pas déranger le repos de ceux qui s'étaient déjà couchés. La braise incandescente des cigarettes dans la nuit témoignait de ce rassemblement tardif des gens qui voulaient retarder le plus longtemps possible l'irrespirable fournaise qui occupait l'intérieur des appartements. Les douze coups de minuit de l'horloge de l'école de la place Lelièvre sonnaient le départ pour aller dans les bras de Morphée. Les plus beaux rêves nous procuraient alors la fraîcheur tant espérée en nous faisant nager dans l'eau transparente du Petit Bassin. Par les fenêtres ouvertes, la pleine lune inondait de lumière ma chambre et les objets étiraient leur ombre en oblique dans le même sens. Le sommeil avait du mal à s'imposait dans les nuits caniculaires de mes étés d'enfance, surtout si un moustique s'invitait dans le lit pour boire un coup; il finissait par m'envelopper, je le devait surtout à la fatigue qui me terrassait.

"A Bab el Oued au printemps c'était l'été", depuis 1963, je n'ai plus eu l'occasion de prononcer ces mots, car là où je survis désormais, le printemps et l'été ne se donnent plus rendez-vous comme dans l'Algérie de mes dix ans.

André Noël de CRESCENZO

Le : 15/02/2009 17:46

Oh,les copains,bande de falampos,laissez tout tomber et lisez ce qui suit:(ceux-LA qui z'ont pas eu la CHANCE de fréquenter l'université SIGWALT,qu'on leur lise)

Hier,mon copain Jojo Torres de la Consolation,mon frèrer Christian et moi-même des messageries,étant les trois "oualiones" de Bab El Oued, avons ENFIN réservé nos places d'avion pour ALGER prévue pour avril. A la sortie de l'agence;nous brandissions les billets qui à nos Z'yeux avaient autant de valeur qu'un premier prix de la loterie Nale......

Aprés avoir effectué tout comme les saumons, notre traversée à contre courant,croisant tous les océans qui jalonnèrent notre existance depuis voilà 45 ans,nous allons enfin voir se réaliser bien qu'au soleil couchant de notre vie; le plus cher de nos rêves,à savoir nous baigner et purifiés hélas pour quelques jours;de notre terre-quartier(étant également celle de nos parents)qui nous a permis le plus grand des bonheurs qu'est de naître en son sein,nous nourrissant d'une SÈVE UNIQUE AU MONDE!!!!!!!!!!!!

Enfin nous y serons comment non!!!!au rendez-vous de Rognes le 31 mai,

bien que nous résidons à Denia(Alicante)le voyage en vaut la peine,pourquoi ??? Ben pour embrasser toutes les gazelles(filles)de chez nous z'autres pardis!! Adios amigos

Michel SUCH

Le : 10/02/2009 17:32

rue de Constantine.

Avec tout ce débat géographique, je n'ai pas retrouvé Filochard et Ribouldingue.

Et pour la concierge du site,tout naturel pour quelqu'un qui est le petit fil d'Angèle le Maltaise (celle qui enlève les coups de soleil...)concierge rue François Serrano anciennement rue de la Vigie... Il va voir... tout balèze qu'il est ce falumpo (j'écris avec mon oreille, celle qui est sourde, alors lauretographe...) y va voir le maire de BEO. BEO sur la branche, qui descend de branche... Faites pas entention. J'ai des douleurs trop grandes. Écrire des conneries me fait du bien et tant que Christian ne fait pas payer la séance de psy, j'en abuse.

Michel

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